<227>Envier les destins qu'ont eus en combattant
Le généreux Belle-Islea et l'illustre Bavière.a
Ce héros triomphant est réduit en poussière,
Tout est anéanti, de l'Achille saxon
Il ne nous reste rien que son illustre nom,
Des sons articulés, des syllabes stériles,
Qui frappent du tympan les membranes subtiles,
Et vont se dissiper dans l'espace des airs,
Tandis que le grand homme est rongé par les vers.
Nos soupirs, nos regrets, ce souvenir, sa gloire,
Ses combats, où toujours présida la victoire,
Tout se perd à la fin; l'immensité des temps
Absorbe jusqu'aux noms des plus grands conquérants.
Si Maurice n'est plus, dites, qu'a-t-il à craindre?
Nous qui l'avons perdu, c'est à nous de nous plaindre;
C'est un pilote heureux qui vient d'entrer au port.
Le sage de sang-froid doit regarder la mort :
Des maux désespérés son secours nous délivre,
Il n'est plus de tourments, dès qu'on cesse de vivre;
Qui connaît le trépas ne le fuit ni le craint.
Ce n'est pas, croyez-moi, ce fantôme qu'on peint,
Ce squelette effrayant dont la faim dévorante
Engloutit des humains la dépouille sanglante,
Et, par d'amples moissons qu'il fait dans l'univers,
Remplit incessamment l'abîme des enfers.
Ce sont des songes vains que ces plaintives ombres


a Le chevalier de Belle-Isle, frère du maréchal, fut tué le 19 juillet 1747, en attaquant les retranchements d'Exilles, sur le col de l'Assiette. Voyez t. IV, p. 15.
     Le comte Emmanuel-François-Joseph de Bavière, né en 1704, fils naturel de Maximilien II Emmanuel, électeur de Bavière, fut tué à la bataille de Laeffelt, le 2 juillet 1747.